Type et date de soutenanceSoutenance de thèse

Roman noir et critique sociale. Réel et violence dans le néo-polar (après mai 68)

Sybila GUENEAU

Résumé :

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Le mouvement du « néo-polar » ou « Nouvelle école du polar français » nait en France après les événements de mai 1968. Son fondateur, l’écrivain Jean-Patrick Manchette, également à l’origine du terme, forge un genre inspiré du roman noir américain lequel incarnera le tournant politique du polar français. Ses principaux auteurs, Jean-Patrick Manchette, Pierre Siniac, Frédéric Fajardie, A.D.G., Jean Vautrin, Jean-Bernard Pouy, Hervé Prudon, Thierry Jonquet et Didier Daeninckx, travaillent une écriture de la violence au plus près de la contestation politique tout en mettant en tension les codes du roman noir. Depuis l’apparition du néo-polar, le roman noir français s’attache à questionner les crises sociales de son temps. Le tournant social du genre privilégie une critique de la société de consommation, des institutions politiques et de la vie quotidienne des classes populaires faisant écho aux débats à teneur sociologique de l’époque. Les romanciers du néo-polar introduisent dans la fiction criminelle, par leur travail sur la narration, une pensée critique du contemporain à travers la représentation des corps comme marchandises et une réflexion sur la violence autant physique que symbolique, les entremêlant sans cesse. Dans le sillage de Jean Baudrillard, Michel Foucault, Guy Debord, et l’influence du cinéma et du mouvement punk, ils produisent un dialogue entre littérature populaire, sciences sociales et pensée politique. Cette thèse, la première prenant pour objet le néo-polar en tant que mouvement littéraire, propose une réflexion sur les formes que prend le discours de la critique sociale dans le genre en s’appuyant sur un corpus de romans écrits par ses auteurs principaux. En se fondant sur une analyse autant littéraire et sociologique que narratologique, elle articule trois directions d’analyse : le dépassement des codes du genre noir, la mise en place de nouvelles structures narratives et leur signification. S’ inscrivant dans le sillage du situationnisme, le néo-polar place l’individu face à la violence propre au crime et à celle d’une société monstrueuse et aliénante. Ces représentations mettent la violence au centre de la réflexion : dans la diégèse, mais aussi dans la langue. La thèse considère enfin l’ambiguïté du discours politique d’un genre que l’on a coutume de qualifier comme le virage à gauche du roman noir français mais que nous concevons plutôt comme sa forme déconstruite et nihiliste, à l’image de ce que le mouvement musical punk fût pour le genre rock à la même époque. Ce travail replace le mouvement du néo-polar dans l’histoire de la littérature populaire de la seconde moitié du XXe siècle en soumettant à l’analyse littéraire des ouvrages qui ne l’ont jamais été auparavant (les romans d’Hervé Prudon, Pierre Siniac, Jean Vautrin et Thierry Jonquet). Il entend mettre à jour l’empreinte que ce mouvement a laissé sur la culture populaire de l’époque. Loin de n’être qu’un effet de mode, le néo-polar témoigne d’une vision renouvelée de la littérature de genre qui, dans le sillage de mai 68, questionne autant la littérature que les institutions politiques.

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Jury

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  • M. Philippe Roussin (Directeur de thèse), CNRS
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  • M. Philippe Daros, Université Sorbonne Nouvelle
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  • M. Matthieu Letourneux, Université Paris-Nanterre
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  • M. Olivier Penot-Lacassagne, Université Sorbonne Nouvelle
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  • Mme Thiphaine Samoyault, EHESS
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