Type et date de soutenanceSoutenance de thèse

Le disque politique en France (1929-1939)

Jonathan Thomas

Jonathan Thomas

Résumé

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Entre 1929 et 1939, les principales organisations politiques françaises se tournent vers le disque pour faire exister leur propagande dans un contexte de tumulte et d’intense compétition politiques. Si le son enregistré a suscité des usages politiques imaginaires ou réels dès les premiers moments de sa publicisation, il n’avait encore jamais été employé ainsi avec une telle constance et une telle complexité. La production d’enregistrements de propagande est assurée par des entreprises proches ou affiliées à des organisations politiques, qui conçoivent ce que nous nommons des « disques politiques » et les rassemblent dans des catalogues à la structuration plus ou moins complexe, pour qu’ils soient écoutés au cours des réunions partisanes et dans les foyers militants. Leur nombre, ainsi que la fréquence et la durabilité de leurs usages semblent indiquer que la propagande partisane prend alors un virage sonore, dont la technicisation a augmenté la puissance et l’a rendue indispensable. Il est alors significatif que le disque, objet négligé par l’histoire et la science politiques, ait été le premier et le principal médiateur de cette nouvelle propagande sonore, et, disponible à cette fin dès la fin des années 1900, qu’il ne l’ait véritablement été qu’à partir de 1929. Il faut comprendre ce qui a changé dans la socialisation du disque pour qu’il devienne « politique », puis comprendre comment il a existé ainsi tout au long des années 1930 pour des organisations adversaires. Par cette étude ancrée dans l’histoire culturelle et politique, la musicologie et les sound studies, nous renseignons un pan méconnu de l’histoire du disque et de la communication politique, et réfléchissons aux usages du son engagés en démocratie. À cette fin, nous disposons notamment de nombreuses archives de presses, riches d’articles et de publicités vantant le disque politique, ainsi que des disques eux-mêmes, dont l’écoute nous a permis de mieux comprendre les perspectives stratégiques de leurs usages. En suivant la piste de l’évolution de l’imaginaire de la puissance politique et de la puissance de faire du son, du son enregistré et du disque, nous avons montré comment ce dernier a été investi d’un pouvoir politique grandissant à mesure que sa présence et ses usages sociaux devenaient massifs. Par ailleurs, nous avons montré que le disque, présenté à son public comme un moyen puissant et incontournable de propagande, a été utilisé comme un modulateur de l’attention militante, un médiateur de l’autorité des oratrices et des orateurs, et un diffuseur de modèles de la mobilisation politique. Le son enregistré débutant et le disque politique sont, selon nous, parmi les premières occurrences historiques de la reconfiguration des usages politiques du son occasionnée par la technique et sa puissance inédite de faire. Leur étude ouvre ici la voie à une pragmatique politique du son dont le développement est à venir.

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Jury

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  • M. Esteban Buch (Directeur de thèse), EHESS
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  • Mme Barbara Carnevali, EHESS
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  • Mme Françoise Denoyelle, ENS Louis Lumière
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  • Mme Sophie Maisonneuve, Université de Paris
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  • M. Pascal Ory, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
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  • M. Peter Szendy, Brown University
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  • M. Ludovic Tournès, Université de Genève
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