Matthias Kern

Membre associé.e

SUJET ET DIRECTION DE THÈSE

L'amour du peuple. Esthétique populiste et imaginaire du populaire dans la culture française de l'entre-deux-guerres

Direction de thèse : Philippe Roussin et Roswitha Böhm

Thèse soutenue le 17 décembre 2019.

RÉSUMÉ DE LA THÈSE

La production culturelle de l’entre-deux-guerres se distingue par un intérêt renouvelé pour la représentation des enjeux sociaux qui troublent la vie quotidienne de la population française : le travail et la misère dans un espace de plus en plus urbanisé deviennent les sujets primordiaux dans la littérature, la photographie et le cinéma, notamment pendant la période entre 1928 et 1939. Face à la crise financière, les grèves ouvrières et l’essor du Front populaire, le champ artistique réagit avec un renouveau des formes de représentation réaliste qui doit aboutir à l’interrogation de la nature du ‘peuple’, des liens sociaux qui le déterminent et de la survie des traditions populaires pendant la modernisation des pratiques quotidiennes.   En littérature, un courant éphémère du roman domine les débats à partir de 1929 : le roman populiste, courant fondé dans un manifeste de Léon Lemonnier. Il devient rapidement la toile de fond d’une discussion sur le besoin de renouveler le roman réaliste et naturaliste. Simultanément, le groupe de la littérature prolétarienne autour d’Henry Poulaille se réclame de la même volonté en donnant la voix aux ouvriers. Les deux groupes, ainsi que beaucoup d’autres auteurs qui se rapprochent du populisme littéraire, réclament un renouveau du roman par le biais de la description du ‘peuple’ et de ses conditions de vie. La notion de ‘peuple’ s’oppose, dans ce contexte, à la bourgeoisie et ses écritures ‘psychologique’ et ‘snobiste’. Recourir au ‘peuple’ signifie donc avant tout une certaine esthétique anti-bourgeoise, mais – contrairement aux avant-gardes – également antimoderne, créant l’imaginaire d’une normalité marqué par la pauvreté qui devrait correspondre à l’expérience de la majorité de la population française. La thèse présente cherche à dégager d’abord les éléments d’un tel imaginaire du ‘peuple’ en s’appuyant sur la critique artistique ainsi que sur l’analyse de plusieurs romans de la nébuleuse du roman populiste : Pierre Mac Orlan, Eugène Dabit, André Thérive, Marcel Aymé et Henry Poulaille. Elle montre ensuite la survie des éléments esthétiques du populisme dans le film du réalisme poétique et dans la photographie documentaire qui donne naissance à la photographie humaniste. Ce faisant, ce travail représente une contribution sociocritique à l’histoire des idées de l’entre-deux-guerres français et signale les pièges idéologiques d’une esthétisation de termes comme ‘petites gens’ et du ‘peuple’.

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