Jean-Luc Amalric

Membre associé.e

Professeur en CPGE Arts et Design à Nîmes

Membre associé du C.R.A.L – EHESS

Membre associé de C.R.I.S.E.S – Université Montpellier 3

Coordonnées professionnelles :

jean-luc.amalric@orange.fr

jean-luc.amalric@ehess.fr

14 rue de la Ranquette, Le Carré Liberté A 41, 30900 Nîmes.

Présentation :

Né le 8 mars 1965 à Montpellier, Jean-Luc Amalric est agrégé de philosophie, docteur en philosophie de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et qualifié au titre de maître de conférences (section 17 – philosophie - du CNU).

Après avoir enseigné la philosophie en France pendant 20 ans (en terminale, en classes préparatoires et à l’université), puis durant 4 ans au Brésil (dans le cadre d’un post-doctorat à la P.U.C de São Paulo), il est actuellement professeur de philosophie en CPGE Arts et Design à Nîmes.

Membre du Conseil scientifique du Fonds Ricœur, il co-dirige depuis 2015 la revue bilingue franco-américaine Etudes ricœuriennes, Ricœur studies. En collaboration avec George H. Taylor, il travaille également pour le Fonds Ricœur et pour les Editions du Seuil à l’édition scientifique et à la traduction des « Lectures on imagination » : cours sur l’imagination professé par Ricœur en 1975 à l’Université de Chicago.

Dans le cadre d’un séminaire intitulé « Repenser l’imagination aujourd’hui » et initié en 2018 à l’EHESS, il consacre actuellement ses recherches à l’élaboration d’une théorie générale de l’imagination, à travers la mise en œuvre d’un dialogue constant entre philosophie, sciences sociales et sciences cognitives. En partant d’une analyse des fonctions pratique, poétique, sociale, critique et cognitive de l’imagination et de leur articulation précise, il s’agit d’esquisser une théorie de l’imagination incarnée - comme puissance d’innovation et de configuration œuvrant à la charnière du discours et de l’action – et d’en examiner la fécondité au plan épistémologique, esthétique, éthique et politique. L’hypothèse directrice de ces recherches est que le phénomène de l’imagination ne devient intelligible - dans sa complexité et son dynamisme productif – que si l’on pense un dédoublement originaire du procès incarné de l’imagination s’exprimant dans les termes d’une dialectique entre « imagination symbolique » et « imagination fictionnelle ».

Thèmes de recherche : 

  • L’imagination dans l’agir, le savoir et la création.
  • La question des rapports entre imagination et discours philosophique
  • La question de l’imagination dans la philosophie française du 20ème siècle (Sartre, Merleau-Ponty, Bachelard, Simondon, Ricœur, Castoriadis)
  • La philosophie de Paul Ricœur
  • Phénoménologie, herméneutique et déconstruction.

Principales publications :

Livres :

– Paul Ricœur, l’imagination vive. Une genèse de la philosophie ricœurienne de l’imagination (Paris, Hermann, 2013, 688 p.).

Présentation de l’éditeur :

Partant de l’hypothèse selon laquelle l’élaboration d’une théorie générale de l’imagination constitue l’une des visées centrales de la philosophie ricœurienne et l’un de ses legs les plus prometteurs, ce livre se propose de travailler à une genèse rigoureuse de cette philosophie de l’imagination, en s’appuyant principalement sur les trois œuvres qui composent la Philosophie de la volonté. À travers une analyse des dialogues de Ricœur avec Sartre, Nabert, Bachelard, Merleau-Ponty, Jaspers, Cassirer, Husserl et Heidegger autour de la question de l’imagination, il s’agit de montrer comment cette première grande œuvre philosophique ricœurienne esquisse une théorisation très novatrice de la fonction poético-pratique de l’imagination – capable tout à la fois de poser les bases d’une réhabilitation générale de la fonction de l’imagination dans l’agir humain et d’initier une réflexion critique sur les usages méthodologiques de l’imagination dans le discours philosophique.

 

– Ricœur, Derrida : l’enjeu de la métaphore (Paris, Presses Universitaires de France, Collection Philosophies, 2006, 160 p.).

Présentation de l’éditeur :

Contrairement à l’idée reçue selon laquelle la métaphore ne serait qu’un ornement secondaire du concept philosophique, il s’est agi ici de mettre au jour une dépendance plus fondamentale et plus dissimulée de la pensée philosophique à l’égard de métaphore. Un certain travail métaphorique traverse en effet le discours philosophique à la manière d’une énigme puisqu’il paraît tout à la fois dynamiser et menacer son déploiement spéculatif. Or, c’est précisément autour de cette énigme de la métaphore que s’est nouée une singulière discussion entre Ricœur et Derrida. C’est à Paul Ricœur qu’il revient d’avoir initié ce débat dans la 8e étude de La Métaphore vive (1975) sous la forme d’une critique adressée à La Mythologie blanche (1971) de Jacques Derrida, et cette critique donnera lieu trois ans plus tard à une réponse de Derrida dans Le Retrait de la métaphore (1978). Les termes de cet échange prennent souvent un tour paradoxal et déconcertant : tandis que Ricœur attribue à Derrida des thèses qu’il s’efforce de réfuter car elles lui semblent menacer le projet même de son herméneutique critique, Derrida conteste de son côté cette interprétation en revendiquant le statut déconstructif de son écriture et en soulignant au contraire les points d’accord qui le rapprochent de Ricœur. La clé de cette discussion nous a paru résider dans le positionnement complexe des deux penseurs à l’égard de la critique heideggérienne du lien entre métaphorique et métaphysique ; et c’est l’écart entre une pensée de la différance et une pensée de l’acte que nous nous sommes efforcé de mettre en relief en posant la question de l’écriture philosophique dans ses rapports à l’imagination productrice. S’il est un enjeu de la métaphore, c’est que, dans ses rapports à la philosophie, elle implique une certaine détermination du statut du concept philosophique, conduit à une conception spécifique de la textualité et engage une interrogation d’ensemble sur la possibilité (ou l’impossibilité) d’un renouvellement de l’ontologie.

– Ricœur, Derrida. El desafío de la metáfora (Traducción : Jennifer Rivera y Fabrizio Pineda. Bogota, Universidad Externado de Colombia, 2012, 180 p.).

 Chapitres de livre :

- 2020 : “Le statut de l’utopie dans la philosophie de l’imagination de Ricœur” in Penser l’utopie aujourd’hui avec Paul Ricœur (volume collectif dirigé par Sébastien Roman, Presses Universitaires de Vincennes, 2020).

- 2019 : “Finitude, Culpability and Suffering : The Question of Evil in Ricœur” in A Companion to Paul Ricœur’s  Fallible Man, (Editor : Scott Davidson, Lexington Books – 2019).

- 2018 : “Act, Sign and Objectivity. Nabert’s Influence on the Ricœurian Phenomenology of the Will” in A Companion to Paul Ricœur’s  Freedom and Nature, (Editor : Scott Davidson, Lexington Books – 2018).

- 2018 : Préface au livre : Entre Ricœur e Freud. Você é quem pensa ser ? A desapropriação e a reapropriação da consciência de Jefferson da Silva (Editora CRV – Curitiba, Brasil, 2018).

- 2017 : “Ricœur, Castoriadis : productive imagination between mediation and origin” in Ricœur and Castoriadis in Discussion : On Human Creation, Historical Novelty, and the Social Imaginary (Dir. Suzi Adams, Rowman and Littlefield Publishers, 2017).

- 2017 : “Ricœur, Foucault : subjectivation et auto-affection” in La subjectivation du sujet. Etudes sur la modalité du rapport à soi-même (volume collectif dirigé par Olivier Tinland et Rodolphe Calin, Editions Hermann, 2017).

 

 Articles :

- 2018 : “La médiation vulnérable : puissance, acte et passivité chez Ricœur” in Etudes ricœuriennes/Ricœur studies, vol. 9 n°1, 2018. 

- 2016 : “L’articulation de l’éthique et du politique dans l’horizon d’une philosophie de l’acte” : Deuxième partie : “L’oubli de l’acte dans le signe et la réappropriation critique des ressources éthico-politiques de l’imaginaire” in Eco-ethica, Volume 5, 2016 (Lit Verlag / edited by Peter Kemp and Noriko Hashimoto).

- 2015 : “L’épreuve de la métaphore : éléments pour une critique du discours philosophique” in Remates de Males, Volume 35, n° 2, 2015 (Revista de Teoria e História Literária, ISSN 0103-183X).

- 2015 : “L’articulation de l’éthique et du politique dans l’horizon d’une philosophie de l’acte” : Première partie : « Anthropologie philosophique et métaphysique de l’acte » in Eco-ethica, Volume 4, 2015 (Lit Verlag / edited by Peter Kemp and Noriko Hashimoto).

- 2014 : “Evénement, idéologie et utopie” in Etudes ricœuriennes/Ricœur studies, vol. 5 n°2, 2014.

- 2014 : « Introduction » au Vol. 5 n° 2, 2014 de la revue Etudes ricœuriennes/Ricœur studies. Titre du numéro: “La question de l’imaginaire social et politique”.

- 2014 : “D’une convergence remarquable entre phénoménologie et philosophie analytique : la lecture ricœurienne des thèses de Sartre et Ryle sur l’imagination” in Etudes ricœuriennes/Ricœur studies, vol. 5 n°1, 2014.

- 2014 : “La notion d’anthropologie privative dans la phénoménologie de la vie de Renaud Barbaras : de l’anthropologie privative à la biologie privative” in IRIS – Annales de philosophie, volume 35 – Année 2014, Faculté des lettres et des sciences humaines – Université Saint-Joseph.

- 2013 : “Traduzir : do impossível ao difícil. Em torno da concepção ricœuriana da tradução” (« Traduire : de l’impossible au difficile. Autour de la conception ricœurienne de la traduction »), Prometeus, Filosofia em revista, Universidade federal do Sergipe, ano 6 n° 12, julho-dezembro de 2013.

- 2012 : “L’imagination poético-pratique dans l’identité narrative” in Etudes ricœuriennes/Ricœur studies, vol. 3, n°2, 2012.

- 2011 : “Affirmation originaire, attestation et reconnaissance. Le cheminement de l’anthropologie philosophique ricœurienne” in Etudes ricœuriennes/Ricœur studies, vol 2, n°1, 2011.

 

 Actes de colloques :

- 2016 : “Símbolo, metáfora e narrativa : o estatuto do ficcional em Ricœur” (« Symbole, métaphore et récit : le statut du fictionnel chez Ricœur ») in Actes du Simpósio Internacional Hermeneia II, septembre 2013 - « Pensar Ricœur : vida e narração » ; organisé par L’UFSC ; Edições Clarinete, Porto-Alegre, Brasil.

- 2006 : “L’Expérience brisée et l’attestation dans l’herméneutique critique de Ricœur” in Expérience et herméneutique, dir. Guy Deniau, André Stanguennec, Actes du colloque de l’Université de Nantes, juin 2005 (Le Cercle Herméneutique Editeur).

 

Présentation du projet de recherche C.R.A.L (EHESS) / Fonds Ricœur

Séminaire  C.R.A.L / EHESS , Fonds Ricœur : Repenser l’imagination aujourd’hui

Professeur responsable : Jean-Luc Amalric

 L’objectif de ce séminaire - qui a commencé en 2018 et se déroulera sur trois ans - est de poser les linéaments d’une théorie générale de l’imagination, à travers la mise en œuvre d’un dialogue constant entre philosophie, sciences sociales et sciences cognitives. En partant d’une analyse des fonctions pratique, poétique, sociale, critique et cognitive de l’imagination et de leur articulation précise, il s’agira d’esquisser une théorie de l’imagination incarnée - comme puissance d’innovation et de configuration œuvrant à la charnière du discours et de l’action – et d’en examiner la fécondité au plan épistémologique, esthétique, éthique et politique.

Compte-rendu de l’année 2018-2019

Durant l’année 2018-2019, nous avons commencé par dresser un état des lieux des recherches actuelles concernant l’imagination. La question de l’imagination ne cesse aujourd’hui de gagner en importance dans les sciences cognitives et dans les recherches en sciences sociales, en épistémologie de l’histoire, en théorie littéraire, en théorie de l’art ou en théorie du design. Après avoir été longtemps discréditée, dans la philosophie comme dans les sciences, tout se passe en effet comme si l’imagination était en train d’acquérir un nouveau droit de cité dans ces disciplines. 

Nous avons ensuite cherché les raisons de ce retour en grâce de la question de l’imagination. L’une des raisons et non des moindres de ce nouveau regard porté sur l’imagination nous vient à l’évidence des développements actuels des sciences cognitives et des neurosciences. Alors que, dans la première partie du 20ème siècle l’image mentale avait constitué l’une des cibles favorites de la critique philosophique et scientifique, l’étude de l’imagerie mentale et celle de la simulation mentale ont eu pour conséquence de remettre au goût du jour une théorisation de l’activité imaginative tout en la renouvelant profondément. Même si la psychologie cognitive reste encore timide dans l’usage qu’elle fait du terme « imagination », elle nous a ainsi progressivement libérés d’un comportementalisme étroit qui assimilait l’esprit à une boîte noire pour n’en retenir que la part réactive. 

Du côté des sciences humaines et sociales, c’est, nous semble-t-il, le recul de deux paradigmes dominants - le marxisme et le structuralisme – qui explique au moins en partie la redécouverte et la réhabilitation progressive de l’imagination dans ces domaines. Le point commun du marxisme et du structuralisme, dans leur prétention à la science et à la rationalité, c’est qu’ils se sont l’un et l’autre construits à partir de la mise en œuvre d’une critique radicale de l’imaginaire.  Que celui-ci soit ramené à une superstructure illusoire, à une croyance idéologique, à un fantasme ou à un simple épiphénomène, il s’est agi à chaque fois de réduire l’imaginaire pour laisser place à une approche prétendument scientifique du réel. Avec le déclin de ces deux paradigmes qui avaient contribué à une occultation et une dévalorisation durables de la question de l’imaginaire, il est logique que nous assistions aujourd’hui au retour de l’ostracisé.

Tout en essayant d’établir une cartographie de ces mutations et de l’importance croissante de la question de l’imagination dans des disciplines aussi différentes que la sociologie, l’anthropologie, la géographie, l’épistémologie de l’histoire ou la théorie littéraire, nous avons choisi de focaliser notre attention sur deux champs de recherches particuliers. Le premier est celui des théories sociologiques ou anthropologiques de l’imaginaire social (celles notamment de Benedict Anderson, Arjun Appadurai, Zygmunt Bauman et Bronislaw Baczko) que nous avons confrontées aux philosophies de l’imaginaire social de Ricœur et de Castoriadis. Le second est celui de la théorie littéraire et il a donné lieu le 26 novembre 2018 à une journée d’étude co-organisée par Cristina Henrique da Costa et Olivier Abel (à laquelle ont également participé Rodolphe Calin - UPV- et Marielle Macé – CRAL) et consacrée à la question de l’imagination poétique comme possible renouvellement des études littéraires.

A partir de cet état des lieux argumenté des recherches actuelles sur l’imagination, nous avons enfin défini la tâche philosophique que nous assignons à ce séminaire pour les deux années à venir : tenter de construire une théorie cohérente de l’imagination capable d’articuler ces champs de recherches éclatés à partir de l’idée d’un dédoublement originaire du procès incarné de l’imagination s’exprimant dans les termes d’une dialectique entre « imagination symbolique » et « imagination fictionnelle ».

[En 2018-2019, le séminaire a réuni en moyenne 38 étudiants et a donné lieu à 23 validations en Master]

Programme de l’année 2019-2020

         Cette année, notre point de départ consistera à montrer qu’une théorie renouvelée de l’imagination productrice ou du procès producteur de l’imagination dans les domaines théoriques, pratiques, techniques ou artistiques doit renoncer à conférer à l’imagination un statut d’origine. Prenant acte du caractère toujours indirect et analogique de notre accès à l’idée d’une spontanéité productrice de l’imagination – opérant tant au plan individuel qu’au plan social – une telle théorie doit au contraire reconnaître le fait que l’acte d’imaginer se donne toujours comme un mixte d’expérience et d’acte. Or, ce que signifie ce mixte de réceptivité et d’activité, d’appartenance et de distanciation, c’est que le procès de l’imagination productrice ne devient intelligible que si on le pense comme un procès toujours déjà dédoublé – c’est-à-dire, en d’autres termes, comme une relation dynamique et dialectique entre deux formes d’imagination toujours déjà corrélées. 

D’un côté, nous désignerons par le terme « d’imagination symbolique », ce milieu ou cette médiation imaginative toujours déjà là à travers laquelle advient notre expérience du monde, des autres et de nous-mêmes. Et de l’autre, nous appellerons « imagination fictionnelle » cette puissance fondamentale de modélisation du réel qui résulte de notre capacité de distanciation critique à l’égard de ce milieu toujours déjà là que constitue l’imaginaire symbolique dans sa pluralité culturelle et historique. 

C’est parce que nous avons le pouvoir de suspendre ou de neutraliser notre expérience d’appartenance à cet imaginaire symbolique que nous sommes en retour capable de redécrire, de refigurer, de reconstruire et de transformer le réel à travers un « travail fictionnel » qui s’exprime aussi bien au plan de la connaissance scientifique, de la production technique que de la création artistique. A nos yeux, une exploration du phénomène dédoublé de l’imagination ne prend sens qu’à la lumière de cette notion de « travail » ou de « pratique imaginative ». Notre thèse directrice est en effet qu’il faut partir de l’agir et non du « voir » ou de la représentation si l’on veut saisir la spécificité profonde de la productivité imaginative.

         Ce dédoublement de l’imagination et cette praxis imaginative une fois définis, nous focaliserons cette année notre attention sur la question de l’imagination symbolique en analysant les trois zones d’émergence fondamentales du symbolisme (à savoir : le cosmique, l’onirique et le poétique) et en nous arrêtant tout particulièrement sur le corps désirant et percevant comme foyer originaire du déploiement de l’imagination symbolique.

Programme détaillé des séances :

14 octobre 2019 : Séance introductive : Sciences sociales, sciences cognitives et imagination.

25 novembre 2019 : « Castoriadis et les imaginaires kaléidoscopiques » - conférence / débat avec Suzi Adams [Université Flinders / Australie : elle a publié notamment Castoriadis’s Ontology : Being and Creation (2011) ; Ricoeur and Castoriadis in discussion (2017) et dirige la collection Social Imagineries]. 

9 décembre 2019 : Le dédoublement de l’imagination : la dialectique de l’imagination symbolique et de l’imagination fictionnelle.

13 janvier 2020 : « Terre immobile et imagination. A partir de Husserl » - conférence / débat avec Paul Ducros [Université Montpellier 3, il a publié notamment Husserl et le géostatisme. Perspectives phénoménologiques et éthiques (Cerf, 2011) et Sensibilité et imagination. L’esthétique de Hugo von Hofmannsthal (Hermann, 2017)].

10 février 2020 : Explorations de l’imagination symbolique à partir de Ricœur, Bachelard et Merleau-Ponty. Les trois zones d’émergence du symbolisme : le cosmique, l’onirique et le poétique. Le foyer corporel de l’imagination symbolique.

 9 mars 2020 : « Un point de départ : approches surréalistes du merveilleux (André Breton, Benjamin Péret, Pierre Mabille) » - conférence /débat avec Jérôme Duwa [Ecole Estienne- Paris, il a publié notamment 1968. Année surréaliste. Cuba, Prague, Paris (2008) ; et Surréalistes et situationnistes, vies parallèles (2008) ].

 27 avril 2020 : « Les imaginaires des corps féminins » - conférence / débat avec Claudine Sagaert [Université de Toulon, elle a publié notamment une Histoire de la laideur féminine (2015)].

11 mai 2020 : Travail du fictionnel et imagination symbolique : praxis, création et imagination incarnée (séance conclusive).

 

Programme de l’année 2020-2021

         La dernière année de ce séminaire sera consacrée à une exploration des différentes modalités de l’imagination fictionnelle. Il s’agira, en choisissant quatre domaines d’application particuliers, de montrer comment s’opère ce « travail du fictionnel », c’est-à-dire ce travail de critique et de modélisation du réel par lequel l’imagination fictionnelle reconfigure et transforme notre expérience du monde tout en prenant appui sur le milieu toujours déjà là de l’imagination symbolique.

Les deux premiers domaines d’application que nous avons choisis sont ceux de la théorie littéraire et de l’épistémologie de l’histoire. Nous les aborderons en nous référant de manière privilégiée à La Métaphore vive et Temps et récit de Paul Ricœur ainsi qu’à L’Essai d’une philosophie du style de Gilles Gaston Granger.

Nous verrons comment la création littéraire et l’acte de lecture ne deviennent intelligibles qu’à la lumière d’une dialectique incessante entre imagination symbolique et imagination fictionnelle.

Cette dialectique apparaît sous des modalités nouvelles lorsqu’on l’aborde d’un point de vue épistémologique à partir de l’analyse de l’exemple précis de la connaissance historique. Non seulement, le statut de cette connaissance n’est intelligible – comme le montre Ricœur - qu’à travers un « entrecroisement de l’histoire et de la fiction », mais nous tenterons de montrer que la relation tensionnelle entre mémoire et histoire peut être pensée comme l’une des modalités de la relation dynamique entre imagination symbolique et imagination fictionnelle.

         Le troisième domaine d’application concernera la théorie philosophique de la technique. A partir de la philosophie de la technique de Gilbert Simondon, de sa théorie de l’invention technique et de son Cours sur L’imagination et l’invention, nous tenterons de penser une articulation entre notre conception de l’imagination symbolique comme « milieu » et la conception simondienne de l’individuation et du « milieu associé », dans son application au mode d’existence des objets techniques. Pour être plus précis, il s’agira ici – à partir de la prise en compte de cette relation dynamique au milieu – d’établir un rapprochement et une corrélation entre, d’un côté, le schématisme sémantique de l’imagination fictionnelle tel que Ricœur le pense dans sa théorie de l’innovation sémantique appliquée à la métaphore et au récit et, de l’autre, le schématisme technique tel que Simondon le pense dans sa théorie de l’invention technique. Au-delà de cette tentative de confrontation entre les théories ricœurienne et simondienne de l’imagination, l’enjeu de cette réflexion sur la technique serait de parvenir à une compréhension précise du statut de l’image numérique, de la réalité virtuelle et, plus largement, des simulations de l’activité imaginative dans le champ de l’intelligence artificielle.

         Nous prolongerons enfin ces trois premières approches du travail de l’imagination fictionnelle dans sa relation tensionnelle avec le milieu de l’imagination symbolique par une réflexion sur la naissance du paysage. Pour ce faire, nous confronterons deux théories contemporaines du paysage – celle, d’une part d’Anne Cauquelin dans L’invention du paysage (1989) et celle, d’autre part, d’Augustin Berque dans Les raisons du paysage. De la Chine antique aux environnements de synthèse (1995). Nous tenterons de montrer à cet effet que les discussions actuelles dans la théorie du paysage (que celle-ci soit élaborée par des géographes, des sociologues, des écologues, des plasticiens, des designers ou des philosophes) révèlent une tension entre une interprétation du paysage en termes de « découverte » et une interprétation du paysage en termes « d’invention ». Par rapport à cette question, tout l’intérêt d’une théorie de la relation dynamique entre imagination symbolique et imagination fictionnelle réside à nos yeux dans le fait qu’elle est susceptible d’éclairer d’un jour nouveau le sens cette tension indépassable entre inventer et découvrir.

Projet complémentaire :

         En dehors de ce séminaire, j’ai travaillé durant ces dernières années en collaboration avec George H. Taylor de l’Université de Pittsburgh à l’établissement scientifique du texte des « Lectures on imagination » de Paul Ricœur à partir des notes manuscrites et des enregistrements de son cours. Dans la mesure où le texte original de ce cours est en anglais, je travaille en ce moment à la traduction en français de ce texte en vue de sa publication aux Editions du Seuil.

L’ouvrage qui paraîtra à la fois au Seuil (en français) et aux Chicago University Press (en anglais) est donc issu d’un cours sur l’imagination donné par Ricœur à l’Université de Chicago en 1975. A travers une série de lectures de textes classiques et contemporains sur l’imagination, ce cours propose une interrogation historique et critique sur le problème philosophique de l’imagination qui représente un complément indispensable à l’analyse de l’imaginaire social développée dans le cours sur l’idéologie et l’utopie professé la même année aux Etats-Unis et déjà publié au Seuil en 1997. Une première partie est consacrée à une lecture de certains textes classiques sur l’imagination depuis Aristote jusqu’à Kant, en passant par Pascal, Spinoza et Hume. Une seconde partie analyse plusieurs conceptions contemporaines de l’imagination issues de la phénoménologie et de la philosophie analytique : elle aborde successivement les thèses de Ryle, Price, Wittgenstein, Husserl et Sartre sur l’imagination. Dans une troisième partie, enfin, Ricœur esquisse les grandes lignes de sa propre théorie de la fiction en proposant un renouvellement original de la conception kantienne de l’imagination productrice, à partir d’une théorisation sémantique de la créativité langagière. Le grand intérêt de cet ouvrage, c’est qu’il se présente comme un véritable laboratoire en vue de l’élaboration de ces deux œuvres maîtresses que sont La Métaphore vive et Temps et récit, en même temps qu’il confirme la place centrale qu’occupe la question de l’imagination dans l’œuvre de Ricœur.

Telle est la raison pour laquelle, dans le prolongement de ce travail d’édition, et dans le prolongement aussi des trois années que je consacrerai au développement de mon séminaire, je souhaiterais organiser, avec l’appui du CRAL – EHESS, du Fonds Ricœur et de CRISES (Centre de recherches interdisciplinaires en sciences humaines et sociales de l’Université Montpellier 3), un colloque précisément consacré à cette question de l’imagination et qui pourrait réunir des chercheurs en philosophie et en sciences humaines et sociales. Dans la mesure où je dirige par ailleurs la revue franco-américaine Etudes ricœuriennes, Ricœur studies depuis 2015, mon vœu serait de consacrer un numéro thématique de la revue à la question de l’imagination dans la philosophie de Paul Ricœur. L’idée serait ainsi de faire coïncider l’année de publication de ce numéro spécial avec la publication du « Cours sur l’imagination » de Ricœur et l’organisation de ce colloque sur la question de l’imagination.

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